dimanche 6 décembre 2009

Pétards mouillés et mimétisme 2.0

Depuis environ cinq ans, le meilleur moyen d'être à la pointe en termes de musique, c'est de flâner sur les milliers de blogs de mélomanes ne demandant qu'à partager leurs goûts (souvent sûrs) avec les internautes. Les blogs musicaux présentent en effet trois avantages.  


Tout d'abord, ils constituent une offre pléthorique. Que vous soyez fans d'électro expérimento-hédoniste, amateurs de reprises ou accros au folk enregistré sur un vieux 8-pistes dans une chambre universitaire de Seattle, il y a (théoriquement) toujours un blog qui vous correspond.
Par ailleurs, ils accordent une grande place aux nouveaux talents. Les blogs musicaux sont pour la plupart le fait d'étudiants faisant la part belle à la musique underground et indépendante (allant même parfois jusqu'au snobisme). De même, le caractère hyper-démocratique et communautaire du web 2.0 en fait un puissant outil de promotion pour les artistes émergents, qui peuvent rapidement se trouver un public.
Enfin, les blogs musicaux sont en première ligne dès qu'un morceau inédit fait surface, ou que des extraits d'un album très attendu "fuitent" sur le net. Cela permet de connaître, parfois des mois à l'avance, ce qui va faire l'actualité musicale, et donc de repérer la tendance. Sans compter que ça reste hyper classe de pouvoir balancer à ses potes "La dernière d'Arcade Fire. L'album sort dans 6 mois."

Cependant, j'ai l'impression que depuis quelques temps cette manne musicale se tarit. Non pas que les blogs musicaux ferment : la blogosphère a naturellement tendance à grossir, pas l'inverse. Mais il me semble que les blogs fonctionnent désormais trop en réseau, jusqu'à tomber dans le mimétisme le plus simple.
Un exemple : la blogosphère s'enflamme actuellement pour le nouveau single du groupe suédois Shout Out Louds, Walls. Des dizaines de blogs relayent la hype autour de cette chanson depuis environ une semaine, s'excusant tous "de ne pas l'avoir postée plus tôt", "d'avoir un train de retard", etc.
Autrefois, un tel engouement collectif aurait été synonyme de "gros carton". Ici, la hype n'est pas vraiment justifiée : Walls est correcte, sans plus. Ce n'est qu'un avis personnel, bien sûr. Toutefois, ce n'est pas la première fois que cela arrive. Nombreux sont les groupes qui suscitent désormais un grand enthousiasme pendant quelques jours, avant de tomber dans l'oubli.
Les blogueurs, trop pressés de rattraper leur retard et faire bonne figure devant leurs  pairs, s'enfermeraient ainsi dans un cercle vicieux qui pourrait à long-terme leur coûter leur prééminence.
Une telle inquiétude se retrouvait récemment chez le spécialiste des NTIC Joshua-Michele Ross. Début novembre, Ross mettait en lumière sur son blog un troublant paradoxe : si internet devrait idéalement multiplier les choix s'offrant à chacun, ceux-ci seraient en réalité encore plus limités par le fort mimétisme suscité par le développement des réseaux sociaux et du web 2.0 en général. Cela renvoie quelque part au concept de contre-productivité, développé par le philosophe Ivan Illitch dans les années 70.

Tout cela reste à relativiser : tous les blogueurs ne sont pas des moutons de Panurge, et nul besoin de prouver que l'Internet se réinvente perpétuellement. Néanmoins, la question mérite d'être posée. Qu'en pensez-vous?



1 commentaire:

  1. C'est un peu triste comme constat ...
    et je ne connaissais pas l'idée de contre-productivité, mais c'est assez pessimiste aussi !
    en tout cas j'espère que ce blog ne cessera pas de nous faire découvrir des nouvelles musiques ^^

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