samedi 18 septembre 2010

Vers la décennie du jeu?

Je voudrais vous parler de mon obsession pour le jeu. Non pas le jeu d’argent, ni le jeu en tant qu’activité réservée aux gamins ou aux dimanches en famille, mais le jeu comme nouveau média.
Aujourd’hui, tout le monde joue. Les jeux vidéos rapportent désormais plus que le cinéma (encore que ce n’est pas nouveau) et ont su, sous l’impulsion de Nintendo notamment, conquérir des publics qui semblaient encore inatteignables il y a 10 ans. 
Dans le même temps, le développement de nouvelles plateformes comme l’iPhone ou Facebook, qui ne servent pas qu’au jeu mais s’y prêtent bien, ont accéléré sa démocratisation. De l’ado qui dégomme du zombie sur PS3 à la mère de famille qui fait sa gym sur Wii, en passant par la gamine qui cultive des fruits dans "Farmville" et le père qui passe son temps dans les transports en commun à battre des records à "Tap Tap Revenge", il y a des jeux pour tout le monde. Il y a des jeux sur tout. Et, au delà, il y a des jeux partout.



Car les mécanismes du jeu ont depuis longtemps largement dépassé les seules sphères de l’enfance ou  du divertissement, pour se retrouver au cœur de nombreux services ou stratégies marchandes. Dans son livre The Tipping Point, l’essayiste Malcolm Gladwell rapporte le succès d’une campagne pour Columbia lancée dans les années 70 par Lester Wunderman. Wunderman était un pionnier du marketing direct et souhaitait faire la promotion télévisée du Columbia Records Club, l’équivalent pour les disques d’un "France Loisirs". Il eut alors l’idée de faire de la publicité sur le mode de la "chasse au trésor". Dans tous les magazines TV de l’époque se trouvaient déjà des publicités pour le Club Columbia. Il ajouta simplement dans leur coin un petit coffre doré. En parallèle, il fit diffuser des spots indiquant aux téléspectateurs que s’ils trouvaient ce fameux coffre, ils pouvaient commander le disque Columbia de leur choix et le recevoir gratuitement —ce qui était normal, puisqu’il s’agissait d’un cadeau de bienvenue au Club... Les résultats furent significatifs. Pourquoi? Parce qu’au lieu de dire "Eh, adhérez à notre club et on vous envoie un disque gratos", ce qui aurait peut-être suffit, Wunderman avait fait jouer son public.
On retrouve ici le concept un peu barbare de "partipulation" (participation + manipulation), forgé dans les années 60 par le publicitaire Tony Schwartz. Trente ou quarante ans plus tard, le principe n’a pas changé, et les jeux sont toujours omniprésents dans la pub : carte à gratter, points à collectionner, mini-jeux sur Internet ou portable, serious games, advergames...

Là vous êtes en train de vous dire que "c’est dégueulasse, les publicitaires nous manipulent et nous prennent pour des gosses"... Mais utiliser les mécanismes du jeu ne sert pas forcément à pousser à consommer. Par exemple, transformer la corvée d’un traitement médicamenteux en occasion de gagner des points, ou participer à des activités pour apprendre à mieux connaître ses collègues de bureaux et leur faire confiance sont d’autres illustrations de ce que le jeu permet. Un dernier exemple : le projet The Fun Theory de Volskwagen, qui postulait qu’on pouvait changer positivement les comportements des gens en jouant la carte du fun (avec cette fameuse vidéo des marches transformées en clavier de piano géant).

Pour Seth Priebatsch, un jeune entrepreneur tout droit sorti de Harvard et qui vient de fonder sa startup, la prochaine décennie sera celle du jeu (je vous conseille cette tribune si vous avez le temps). Si pour lui les années 2000 étaient marquées par le "social" et l'explosion du web 2.0, les années 2010 seront celles du "ludique". Une tendance que l'on observe déjà dans l'émergence de services comme Foursquare, qui repose sur l'accumulation de points et de badges.
Priebatsch, qui n'a que 21 ans, va même jusqu'à penser qu'il suffit de sept mécanismes de jeu pour changer le comportement de n'importe qui! Qu'en pensez-vous?

1 commentaire:

  1. Le marketing propose des outils intéressants. Ces outils peuvent être utilisés à des fins autres que la consommation, en effet. Dans mon boulot, il m'arrive d'organiser des semaines avec jeux (quizz notamment) pour inciter mes collègues à découvrir une problématique. Et ça marche. Apprendre en jouant, n'est-ce pas tout simplement le retour à l'évidence. Les jeunes enfants ne font que jouer, et apprennent tellement dans le même temps.

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