lundi 20 mai 2013

Crowdfunding : le point d'inflexion?



Hasard du calendrier, The Economist et Marie-Claire consacrent cette semaine des papiers au crowdfunding, un système ancien qui semble atteindre son point d'inflexion. En effet, jamais le financement participatif n'aura été aussi observé, étudié, surveillé par les entreprises et les pouvoirs publics. La preuve : le terme vient même de faire son apparition au Journal Officiel! Il faut dire que dans un contexte de récession, toutes les sources de capital sont bonnes à prendre, surtout lorsqu'elles connaissent une croissance aussi spectaculaire : d'après Deloitte, 3 milliards de dollars devraient être investis sur les plateformes de crowdfunding dans le monde en 2013, une somme doublée en 2 ans. Certes, le montant est anecdotique lorsqu'on le compare aux budgets des Etats ou des fonds d'investissement, mais le financement participatif semble voué à exploser tant il présente des avantages.


D'une part, il aide bien sûr à pallier le tarissement des deniers publics ou privés à destination de projets artistiques et/ou innovants. D'autre part, il permet d'impliquer davantage les citoyens et consommateurs dans leur société, en développant l'engagement individuel et la prise de décision. Enfin, comme l'évoque The Economist, il pourrait constituer un premier pas vers une forme de démocratie directe, les internautes étant capables, à terme, d'allouer leurs propres impôts aux projets qui leur tiennent à cœur, dans le cadre d'appels d'offre par exemple.

Qu'il finance un album de musique, la réfection d'un bâtiment ou une startup, le crowdfunding apparaît comme une source de fonds pleinement désintermédiée et fluide, incarnant ainsi la promesse d'un Internet créateur de valeur par le peuple, pour le peuple. A condition d'éliminer plusieurs zones d'ombre, notamment d'un point de vue juridique et fiscal... Le récent rapport Lescure préconisait à ce titre une clarification des règles pour faciliter l'expansion de tels services.

Au-delà, ce phénomène soulève deux questions importantes. 

Premièrement : le crowdfunding est-il soluble dans la finance classique? Pour l'instant, ce système est essentiellement non-lucratif ou rapporte des sommes symboliques à ceux qui investissent. De même, les garanties de bonne gestion des fonds restent rares. Tout cela limite le financement de projets de grande envergure. Peut-on imaginer le développement futur de fonds communs plus importants, plus concentrés, plus stratèges? Dans cette hypothèse, comment les banques réagiraient-elles à la montée d'un crowdfunding davantage orienté vers la rentabilité, qui viendrait concurrencer l'épargne classique, intermédiée? Avec près de 4000 milliards d'euros placés en 2012, les (gros) bas de laine des Français attirent les convoitises...

Seconde question, et pas des moindres  : la montée du crowdfunding ne risque-t-elle pas de pousser les entreprises et dirigeants politiques à se défausser du financement de certains projets trop risqués, en transférant la charge de la prise de risque aux seuls particuliers? Cela serait préjudiciable aux projets les plus ambitieux et freinerait l'innovation.

Qu'en pensez-vous?



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